INFO-BURKINA

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DE L'ENSEIGNEMENT AU JOURNALISME

UNE SAINE MUTATION

Il est enseignant de formation mais la volonté de toucher un large public dans le même temps le conduit dans un masse- média, la radiodiffusion nationale du Burkina. Depuis 1983 il fait usage de son "talentueux don spécifique" qu’est la voix pour servir des millions d’auditeurs à travers le Burkina, l’Afrique et le monde. Fervent croyant, c’est au "Roi de gloire" qu’il dédie son œuvre. Renvoyé "en cellule" dans le département de Saponé aux premiers moments de la rectification de 87 pour exercer son premier métier, il y rencontre "l’élue de son cœur" qui lui donnera cinq héritières et un héritier. Avec comme devise V.A.P (au lieu de VIP), il a pour ambition d’offrir au lectorat burkinabè dans les mois à venir, La Nouvelle Nation où ce lectorat pourra vivre le rendez- vous manqué de La Nation Libre mort- né. En la faveur du jubilé d’or de la doyenne des radios burkinabè où il officie depuis 27 ans, Yannick Laurent Bayala nous ouvre son carnet de souvenirs vieux d’un quart de siècle. Riche et passionnant, il enseigne et instruit.

Bonjour M. Bayala. Présentez- vous à nos lecteurs

Pour me présenter je dirai que je suis Yannick Laurent Bayala, je suis instituteur de formation mais j’exerce à la radiodiffusion du Burkina depuis maintenant 27 ans. Je suis par ailleurs correspondant de la radio Africa N°1 depuis 1985. Je suis au service de la radio de service public depuis ma tendre enfance parce que  j’ai seulement enseigné deux ans avant d’être détaché à la radio nationale pour présenter une émission qui s’appelait à l’époque "Antenne détente", ensuite j’ai commencé à présenter le journal  et surtout j’ai assuré des reportages sportifs tant au plan national qu’international. Je  considère que je suis un homme de terrain formé sur le tas et passionné d’informations et de journalisme.

Radio Burkina vient de fêter son jubilé d’or, vous qui y êtes depuis 26 ans, dites- nous comment vous avez fêté cet anniversaire ?

Le jubilé d’or a été une halte nécessaire pour les acteurs de cette radio que nous sommes et cela nous a fait chaud au cœur de voir que les premières générations de journalistes et d’animateurs de cet organe se sont jointes aux autres générations intermédiaires et aux derniers venus sur la scène radiophonique pour concélébrer  cet anniversaire dans une ambiance à la fois festive et d’introspection sérieuse sur tout ce qui a été fait comme parcours dans cette radiodiffusion nationale. Cela m’a fait chaud au cœur de retrouver des anciens responsables comme Pierre Barry, Piélé Pierre Dabiré, Noël Da, Mafarma Sanogo, Baba Hama. Ça’ a été vraiment un instantané sur un demi-siècle de radio et c’est vraiment des moments saisissants dont certains vont rester pour la postérité. En tout cas ça’ a été de bons moments de retrouvaille, de réflexion et de prise de conscience quant aux défis qui nous restent pour les années à venir.

Quels sont les beaux souvenirs que vous gardez de cette radio à laquelle vous appartenez depuis 1983 que vous intervenez à la radio nationale?

Que de beaux souvenirs ! Au plan sportif ça’ a été la retransmission des matchs de championnats. Je me rappelle que j’ai commenté un match ASRAN – Etoile Filante de Ouagadougou à l’époque gagné par l’ASRAN l’association sportive de la RAN qui est devenue le Rail club du Kadiogo deux buts à un. C’était l’un des tout premiers matchs que j’ai commentés étant assis à même le sol, il n’y avait pas de bancs pour commenter ce match, donc je ne peux pas oublier ça. Je ne peux pas non plus oublier que l’Union sportive de Ouagadougou a été championne  cette saison là. en ce moment aussi je commentais parallèlement les matches pour la presse écrite en l’occurrence l’Observateur Paalga. Les papiers de compte rendu étaient intéressants, ce qui fait que j’avais acquis une certaine notoriété à cause de ce que j’écrivais à l’observateur Paalga. Comme beaux souvenirs aussi il y a eu mes déplacements à l’étranger en 1987 et en 1988 avec les Etalons pour suivre leur match au Libéria. C’était la première fois que je sortais à l’étranger et la première fois aussi que je prenais l’avion officiellement (rires) pour aller déjà au Libéria en 1987 et j’avais 24 ans. Ce sont des moments inoubliables pour le jeune reporter que j’étais à l’époque et qui avais l’honneur de voyager en avion en compagnie de ministres et des meilleurs joueurs du pays. En 87 je n’ai pas pu retransmettre les matchs en direct parce que j’étais seul comme journaliste, je n’avais pas de technicien. L’année d’après en 88 quand je suis reparti au Libéria c’est mon grand frère André Bayala qui étais mon technicien, il est aujourd’hui responsable des techniciens à la radio rurale. Nous avons pu à l’époque assurer un bon reportage.

Il y a eu des moments aussi qui vous ont marqué négativement

Le fait qui me revient à l’esprit c’est bien sûr pour un reportage à l’époque qui était un peu osé à l’époque parce qu’il s’agissait d’élections CDR (comité de défense de la révolution, Ndlr) au premier moment de la rectification. J’ai peut- être dit que les collègues de la radio qui étaient favorables à l’époque au front populaire à l’époque ont été battus sur la plaque par le camp sankariste, donc c’était un peu trop osé pour le dire à l’époque aussi crument, parce que le Capitaine Thomas Sankara venait d’être tué, donc c’est comme si j’avais pris partie pour le camp qui était censé avoir perdu la face à savoir le camp sankariste. On m’avait demandé de ramener mes papiers pour qu’ils voient dans quelles conditions j’avais écrit ce commentaire. J’ai refusé de ramener le papier, de le soumettre à la censure puisque de toute façon il avait été déjà diffusé sur Africa N°1. On m’a demandé étant instituteur d’aller enseigner à nouveau en 88 et je suis allé enseigner pendant deux ans dans le Bazèga notamment dans le département de Saponé. Ça aussi c’a été positif pour moi parce que c’est là- bas que j’ai rencontré celle qui allait devenir quelques années plus tard mon épouse. Ce malheur a eu au finish un aspect positif pour moi. Dans la vie, c’est ma philosophie, je tire toujours avantage des situations les plus délicates parce qu’elles vous instruisent ou vous permettent d’en tirer enseignements pour la suite de votre vie et c’est ce qui m’est arrivé.

                    Je tire toujours avantage des situations les plus délicates

Vous êtes enseignant de formation, mais qu’est-ce qui a fait que c’est le journalisme qui a le plus pesé sur la balance ?

C’est la même pédagogie. J’estime qu’être enseignant c’est bien mais tu  restes cloitré à l’intérieur d’un bâtiment où tu ne parles qu’à une cinquantaine de gamins ou tout au plus si c’est au niveau supérieur tu le fais dans un amphi à cinq cents ou mille étudiants. Mais à la radio quand tu expliques le déroulement de l’actualité dans le journal tu t’adresses à un public beaucoup plus large, des millions d’auditeurs dans plusieurs pays. J’ai adopté la même pédagogie que l’enseignement parce que je suis enseignant dans l’âme. L’un de mes projets les plus chers c’est d’établir un complexe d’enseignement qui va à la fois partir de l’école de base jusqu’au secondaire. L’enseignement je le porte au cœur mais le journalisme c’est beaucoup plus par volonté de toucher davantage de personnes sans compter si Dieu vous fait don d’un talent spécifique comme la voix, vous ne pouvez montrer et démontrer cela que sur une antenne de radio voire à la télévision. Les portes de la télé ne me sont pas ouvertes et je m’emploie lorsque je créerai une agence de communication en bonne et due forme consacrée à l’audiovisuel donc je m’emploie à peaufiner des émissions qui seront à la fois exploitées à la télé et à la radio.

Chaque fois que vous présentez le journal, à la fin on entend "notre œuvre est à la gloire du Seigneur". Est-ce votre marque de présentation ?

Je considère que je ne tire pas avantage de ce qui est censé être du bien de ma personne. Je m’en remets à la volonté de Dieu et je considère que tout ce que je fais qui puisse plaire au maximum de personnes, si c’est en même temps approuvé par Dieu, c’est idéal.  Humblement  c’est au Roi de gloire qui est le Seigneur Jésus que je dédie cela. Ce n’est pas que je veux montrer que je suis plus spirituel que quelqu’un d’autre mais en même temps je pense qu’il faut être honnête avec soi et rendre à Dieu ce qui lui revient. Si Dieu vous a donné un talent, autant le lui reconnaître publiquement. Moi je le fais de bon cœur, je le fais sans gêne aucune, en me disant que finalement tous autant que nous sommes nous sommes au service de Dieu qui est le créateur, qui est celui ayant notre destinée dans ses mains. Moi ma destinée est entre les mains de Dieu.

Vous avez rencontré l’élue de votre cœur à Saponé et on se dit que vous vivez toujours ensembles, combien d’enfants avez- vous?

J’ai six enfants dont cinq filles et un garçon. La première a 18 ans, elle fait la terminale au lycée Wendsongdin à Wayalguin, un lycée créé par mon premier maître d’école. La deuxième fille est au lycée Zinda, les autres sont encore au primaire et le benjamin qui a trois ans et demi vient d’entrer à la maternelle.

Quelle est votre devise dans tout ce que vous faites ?

Ma devise est V.A.P c’est- à- dire Vérité Amour et Paix. Je considère que certaines personnes sont des VIP (very important person), mais pour moi si on doit être véritablement une personne importante, c’est qu’il faut avoir pour tri titre, la vérité, l’amour et la paix. C’est ma devise personnelle et ce sera la devise du journal que nous allons créer avec quelques amis dans les prochaines semaines.

Vous abordez en même temps les ambitions que vous nourrissez pour le moment

Mon ambition c’est de créer le journal, parce qu’il y a eu une première expérience avortée avec la Nation libre il ya de cela quelques douze treize ans avec le regretté Boniface Batiana dit Nobila Cabaret, avec Kéléboué Bayili qui lui aussi est décédé. J’étais l’initiateur principal du journal, ils m’ont aidé à le porter sur les fonds baptismaux. Il y a eu une première phase où on a fait 22 numéros donc six mois et on n’a pas tenu. Boniface a repris le journal tout seul, il ne pouvait tenir ; il y a eu une autre tentative de reprendre le journal il y a de cela dix ans jour pour jour parce que c’était le 27 octobre 1999 (l’interview a eu lieu le 27 octobre 2009, Ndlr) qu’il y a eu la réunion pour tenter de relancer le journal ça n’a pas tenu ; mais je pense que dans les prochains mois on va relancer le journal. Le défi c’est que ce sera un quotidien d’informations générales parce que nous pensons qu’il y a le besoin d’apporter du nouveau en matière de couverture de l’actualité dans la presse écrite. C’est une expérience que je vais tenter avec comme première arme, le cœur et la volonté d’y aller. Je pense que les moyens suivront. On ne va pas se laisser vaincre indéfiniment par le manque de moyens, ce serait une démission coupable. Il y a des choses que l’on porte dans le cœur il faut les sortir absolument pour en faire profiter les générations actuelles et futures. Comme Edouard Ouédraogo a dit que l’œuvre de sa vie c’est l’Observateur Paalga, moi je pense que l’œuvre de ma vie ce n’est pas la radio. Le quotidien que je vais créer avec les moyens de bord, je pense qu’il survivra à celui mort- né La Nation Libre, La Nouvelle Nation c’est ainsi que je vais l’appeler, devrait pouvoir faire tache d’huile peut- être bien l’année prochaine.

Quels conseils à ces jeunes qui aiment vous écouter et désirent emboiter vos pas ?

Je leur demande d’exercer dans l’excellence quelque soit le métier qu’ils ont choisi. Il ya déjà beaucoup de gens dans chaque métier et pour faire la différence il faut faire une somme de travail beaucoup plus importante que le commun, il faut passer beaucoup de temps à travailler, préparer ce que l’on a envie de dire ou de faire pour que ce que vous avez mijoté, vous puissiez l’exposer au grand jour en ayant atteint la perfection, ou quelque chose qui soit de bonne qualité. Je dis aux jeunes de regarder toujours vers le Seigneur, d’avoir la crainte de Dieu parce qu’on ne peut rien faire dans le désordre et en étant dans l’orgueil.  Il faut plutôt se montrer humble, avec beaucoup de calme et ne pas se laisser emporter par les circonstances de la vie mais au contraire tâcher d’exercer le métier qu’on aura choisi avec détermination. Il y a un homme de Dieu qui estime que quelque soit la formation ou la qualité intellectuelle ou le degré de formation de quelqu’un, rien ne peut être déterminant dans sa vie sans l’appel de Dieu. Mais en toute chose aussi il faut reconnaître le besoin vital d’apprendre pour ne pas rester cloitré dans la médiocrité. Se former et toujours apprendre.

Un message aux étudiants qui vous écoute régulièrement

Allez de l’avant, bossez dur à la maison, à l’amphi, partout où on se trouve, lire beaucoup, manifester moins. Vous avez des choses qui bouillonnent dans votre cœur, essayez de  rester en dedans de vous, et sans démission coupable, sans compromission mais en se disant que ce qui va sortir de votre fort intérieur est bien plus important qu’une manifestation publique qu’elle soit violente ou pas. C’est mon message.

 

 

 

Interview réalisée par Koundjoro Gabriel KAMBOU



25/11/2009
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