INFO-BURKINA

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Le cynisme du pouvoir Compaoré

Le Burkina Faso est un pays pauvre. Très endetté. Ce couplet est devenu l’hymne national chanté par les dirigeants de notre pays à chaque fois que des revendications légitimes et vitales sont exprimées par le peuple. Le Burkina Faso a des ressources naturelles limitées, sans accès à la mer, une pluviométrie capricieuse… mais est-ce pour autant que nous sommes pauvres ? Le Burkina Faso n’est pas plus sec qu’Israël, ni son sous- sol plus pauvre que le sous- sol suisse.  « La Suisse dispose de peu de ressources énergétiques indigènes : produits pétroliersgaz et combustible nucléaire sont importés, tant et si bien qu'en 2011 seuls 20,7 % des besoins finaux auront été couverts par des ressources locales... » Source : Wikipédia

L’aide publique au développement pleut abondamment sur le pays des hommes intègres. L’aide publique au développement (APD) nette reçue par le Burkina Faso en 2009 s’élève à 1 084 millions USD. Pendant ce temps, 57 % (soit 8.98 millions de personnes) des 15, 75 millions d’habitants vivent sous le seuil de pauvreté établi à 1.25 USD par jour (WDI, 2011). (http://www.oecd.org/fr/cad/efficacite/Burkina%20Faso%207.pdf). Le 18 mars dernier, lors de sa conférence de presse après sa visite inachevée à l’université de Ouagadougou, j’ai eu l’occasion de dire en face au Premier ministre Luc A. Tiao que nous avons plus un problème de gestion et de gouvernance qu’un problème de pauvreté. M. Tiao m’avait répondu « les Burkinabè sont trop durs avec eux- mêmes. Le Burkina Faso est très bien géré. » Au profit de qui alors ?

 

De 2005 à 2010, le Président Blaise Compaoré avait promis au peuple burkinabè, « le progrès continu pour une société d’espérance ». Le bilan est patent.

Depuis 2010, et ce jusqu’en 2015, pour son dernier bail à la tête du Burkina Faso, Blaise Compaoré a fait la promesse de « bâtir, ensemble, un Burkina émergent ». Nous sommes en 2013, plus de la moitié du mandat est déjà consommé. Le processus d’émergence du pays devrait avoir atteint sa vitesse de croisière. Mais hélas, le Burkinabè lambda est toujours démerdent. 

 

Un regard, un constat

 

J’étais récemment à Gaoua, chef- lieu de la région du Sud- Ouest. Là, l’eau courante est disponible chaque jour entre 23h et 5h du matin. De longues files de bidons vides, des mamans obligées d’écourter leur sommeil et de braver les dangers de la nuit à la quête du liquide précieux… dans une ville d’un pays émergent !

 

Depuis février 2013, comme d’habitude d’ailleurs, la capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, est incapable d’avoir du courant pendant 24 heures sans interruption. La capitale d’un pays émergent ! Mais rassurez- vous, la présidence du Faso a émergé de l’obscurité de la Sonabel. Elle s’est fait installer des plaques solaires.

A l’université de Ouagadougou, les futurs cadres du pays prennent cours assis sur des cailloux ou des morceaux de briques. Dans les villages à quelques encablures de Ouaga, des écoliers apprennent à lire et à écrire sous des hangars ou des arbres, des mères meurent en couche pour faute de centres de santé ou de soins appropriés. Dans le plus grand hôpital national, les malades, les moustiques, les margouillats et autres salamandres se disputent les couloirs. Super, nous sommes vraiment un pays démerdent ! Que dis-je ? Emergent ! Oui bien sûr que nous émergeons. Inexorablement. De l’idiotie vers la bêtise. A ce stade on ne fait quasiment plus attention aux voyants allumés de toutes parts et qui nous avertissent des dangers. On se dit que ça fait partie du décor jusqu’à ce qu’on se retrouve carrément dans le décor.

Dans un Burkina où se nourrir convenablement, se soigner, disposer de l’eau potable permanemment, etc. relèvent d’un luxe inaccessible pour l’écrasante majorité de la population ; l’on se plaît à multiplier aveuglement les dépenses pour ressusciter un roi mort il y a des années. Faut- il être aveugle pour bien voir et comprendre que c’est la fin du système ?

 

Article 37 de la Constitution du Burkina Faso « Le Président du Faso est élu pour cinq ans au suffrage universel direct, égal et secret. Il est rééligible une fois. » ; Loi N° 003-2000/AN du 11 avril 2000. Dura lex, sed lex !

Ces derniers temps il est l’article le plus connu de la loi fondamentale burkinabè. Le concernant, quelle littérature n’a- t- on pas produite ? Quelles déclarations ou analyses n’a- t- on pas lues ou écoutées ? Des plus objectives aux plus absurdes comme cette dernière : « La limitation du mandat est anti-démocratique. » des milliards ont été sottement dépensés, un ministère élégamment érigé pour permettre au sachem d’effectuer le 37ème virage. Echec !

Et comme s’ils n’en ont pas assez de patauger dans l’ignoble boue de l’absurdité et du ridicule, ils veulent nous faire avaler une couleuvre référendaire. Mais quel référendum ? Le peuple s’est clairement prononcé sur ce sujet en 1991. Cette volonté populaire a été arbitrairement modifiée. Dans le sang et les larmes, consécutivement à l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et des manifestations qui ont suivi, la clause limitative du mandat présidentiel, volonté sacrée du peuple burkinabè, fut rétablie. La voie qui mène à la modif. est vraiment bloquée. Il faut trouver une autre parade.

 

Le sénat : « La création du sénat permettra au Burkina Faso d’approfondir sa démocratie », nous verse à la figure le ministre de l’article 37. Sans honte. Monsieur le sinistre, pardon ministre, c’est quelle démocratie vous voulez approfondir ? 36 milliards pour approfondir une démocratie dans l’obscurité (délestages sempiternels) ; les ventres vides de plus de 10 millions de Burkinabè qui vivent sous le seuil de la pauvreté ? Voulez- vous utiliser les corps de ces mères qui meurent en couche comme piliers de votre démocratie ? Quel cynisme ?

 

Blaise Compaoré mourra-t- il avec le Burkina ?

 

Tout cela pour un homme ! Un pauvre mortel ! Messieurs les partisans de l’indispensable Blaise, il mourra demain. Ça vous choque ? Normale, les simples vérités sont toujours de véritables chocs. Va- t- il mourir avec le Burkina Faso ? Puisque selon votre entendement aucun des 16 millions de Burkinabè n’est capable de diriger le Burkina en dehors de Blaise. Moboutou ; Houphouet Boigny ; Omar Bongo ; Kadhafi étaient indispensables pour leurs pays. Vous avez la suite de leurs bouquins, utilisez vos verres correcteurs ! Si malgré tout vous ne voyez pas, les flammes de l’histoire calcineront vos os.

Le travail que vous n’avez pu achever en 25 ans, même si Dieu vous accorde l’éternité, vous ne finirez jamais.

 

PS : Au milieu de la brousse, acculée de toutes parts par les chasseurs, la gazelle poussa un dernier cri perçant, puis expliqua : « Je n’ai pas crié pour que la brousse me sauve, j’ai crié pour que la brousse entende ma voix ! ».

 

K. G. Kambou

 



08/06/2013
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