INFO-BURKINA

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Modification de la Constitution

 

Le CGD formalise le débat

 L’actualité politique ces derniers temps est certes riche mais surtout préoccupante dans la sous- région ouest- africaine. Si en Guinée les Forces vives font tout pour que le putschiste Dadis Camara ne se présente pas aux élections ; en Côte d’Ivoire la tenue effective des élections semble être un mirage ; au Niger le président Tandja a tout mis sens dessus dessous avant de tailler une constitution à sa mesure ; en Mauritanie on a encensé le putschiste Ould Abdel Aziz ; au Burkina Faso c’est la perspective de la modification de la constitution (sur mesure certainement) qui occupe le devant de la scène. Informer le large public sur les tenants et les aboutissants des modifications constitutionnelles, c’est l’objectif poursuivi par le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD). Il a organisé le 19 novembre dernier à Azalaï hôtel, un débat autour du thème « La limitation du nombre de mandats présidentiels en Afrique : le cas du Burkina Faso. »

Au sortir de son 4è congrès statutaire en juillet dernier, le CDP avait laissé entendre une possible modification de la Constitution et certainement le sensible article 37 qui limite le nombre de mandats présidentiels à deux. Depuis lors des voix et des plumes se sont élevées contre ce projet du parti majoritaire. Le débat organisé par le CGD s’inscrit dans ce même ordre de dénonciation. Hommes politiques de l’opposition comme du parti au pouvoir, chercheurs, société civile et journalistes ont répondu en grand nombre à ce débat. D’entrée de jeu le conciliateur dans le bureau exécutif de l’UNDD Noël Yaméogo a tenu à préciser que ce débat n’est ni juridique, ni dirigé contre le président Blaise Compaoré. Ce débat doit être mené largement, longuement et dans le respect des uns et des autres, a- t- il dit. Ce qui est important de noter, c’est que ce n’est pas uniquement dans la 4è République que la limitation du nombre de mandats présidentiels dans notre pays a été constitutionnalisée. Il l’a déjà été dans la deuxième et la troisième République. En effet, l’article 25 de la Constitution de la seconde République stipulait que « Le président sortant est rééligible ; toutefois, il ne peut exercer plus de deux mandats successifs sans discontinuité », et l’article 14 de la Constitution de la troisième République précise également que « Le président sortant est rééligible. Nul ne peut exercer deux mandats consécutifs. En tout état de cause, nul ne peut postuler à un troisième mandat qu’après une interruption effective de cinq ans ».

A l’issue de la contribution introductive de Noël Yaméogo, place fut faite au directeur exécutif du CGD le professeur Augustin Loada pour exposer sur le thème du débat. Le professeur a axé son exposé sur le principe de la limitation des mandats présidentiels, les raisons d’une révision constitutionnelle, comment réviser une constitution et la charte africaine de la démocratie. Répondant à la question du pourquoi limiter le nombre de mandats présidentiels, Pr Loada répond que cette limitation est un moyen de favoriser la circulation des élites, y compris dans le parti au pouvoir, et aussi un moyen de promouvoir la bonne gouvernance. Selon une enquête du réseau Afrobaromètre, les Burkinabè dans leur majorité en campagne et beaucoup plus en ville sont d’avis avec la limitation du nombre de mandats présidentiels. Le professeur Loada a aussi battu en brèche les déclarations de certains leaders du CDP et de la mouvance présidentielle qui tentent de justifier la modification de l’article 37. Pour le président de l’UPR (mouvance) Abel Toussaint Coulibaly, le dernier mot sur la modification de l’article 37 revient au peuple souverain. A cet argument la réponse du professeur Loada est sans ambages. « Le peuple est certes souverain, mais de quel peuple parlons- nous ? Un peuple à 80% analphabète et manipulable à souhait ? L’homme politique qui utilise l’argument de la souveraineté du peuple est soit malhonnête, soit il se ment à lui- même. Hommes politiques, vous n’avez pas le droit d’utiliser la souveraineté du peuple pour servir des intérêts personnels.» Le député Mahama Sawadogo quant à lui estime que la modification de l’article 37 est une question de rapport de force. Là encore le directeur du CGD s’insurge contre et appelle à « sortir les règles du jeu du rapport de force ». Une illustration : le football, le président du Faso aime ce sport, et il sait que parmi les joueurs il y en a qui sont courts de taille, d’autres grands de taille ; donc logiquement des moins forts et des plus forts. Mais tous ceux- ci jouent ensembles. Le plus fort (physiquement) qui utilise sa force dans le non- respect des règles footballistiques, il y a un arbitre qui siffle et sanctionne. Ainsi en est- il du jeu politique et surtout démocratique. Comme dans tout jeu et dans tout travail, il y a des règles à respecter. La sagesse conseille également qu’il faut quitter à temps les choses avant qu’elles ne te quittent.

Après l’exposé du directeur du CGD, la parole est revenue au public. Tous saluent cette initiative du centre pour la gouvernance démocratique de rendre ce débat citoyen et accessible à tous. Si certains intervenants fustigent le régime actuel sous lequel nous vivons en le qualifiant de militariste et non de démocratique, d’autres pensent qu’il est d’une impérieuse nécessité d’activer les réseaux de lutte pour barrer la voie aux fossoyeurs de la démocratie dans notre pays. Comme on le dit, "tout près n’est pas loin". C’est maintenant ou jamais que le combat doit commencer.

 

Koundjoro Gabriel KAMBOU

 



17/12/2009
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